mercredi 1 décembre 2010

LES RESEAUX D’ENSEIGNE EN FRANCE

Depuis une trentaine d’années, les réseaux d’enseignes occupent largement le paysage commercial français. Trois formes de réseaux prédominent dans le commerce de détail : en 2006, 52 % du chiffre d’affaires des réseaux est réalisé par les points de vente possédés en propre par la tête de réseau, 33 % par des membres d’un groupement et 9 % par des indépendants sous contrat de franchise. Certains secteurs commerciaux sont organisés selon une forme de réseau préférentiel : les réseaux intégrés dominent en termes de chiffre d’affaires dans l’aménagement de l’habitat et l’équipement du foyer, tandis que le groupement d’indépendants est majoritaire dans les grandes surfaces alimentaires ; le commerce et réparation automobile fonctionne avec des réseaux de licence de marque. En revanche, les réseaux mixtes franchisés sont présents dans tous les secteurs. Dans la plupart des cas, les têtes de réseaux appartiennent à des groupes de sociétés, confirmant l’imbrication de ces choix d’organisation au sein des circuits de distribution.


Les réseaux d'enseignes occupent le paysage commercial français

Le commerce de détail s’est organisé en réseau pour grouper ses achats, faire de la publicité à l’échelon national, mettre en commun des frais fixes ou des coûts de développement, afin de profiter d’une enseigne reconnue par les consommateurs et de tous les avantages liés à une plus grande taille. Un réseau est généralement repéré par une enseigne commerciale partagée par tous ses membres ; développant des stratégies commerciales propres, ces réseaux réalisent la grande majorité des ventes du commerce de détail et laissent peu de place aux commerces totalement indépendants.
Ces réseaux sont caractérisés par des relations hiérarchiques ou contractuelles entre une unité, dite tête de réseau, et ses membres : par exemple, entre un siège social et ses établissements succursalistes, entre un franchiseur et ses franchisés, entre une coopérative de commerçants indépendants et ses adhérents. Ces relations se limitent parfois à des contrats comme la concession, la commission-affiliation ou la licence de marque .


Un dixième des réseaux concentre 82 % du chiffre d’affaires
Les 455 réseaux suivis dans l’enquête (sources) regroupent 71 000 points de vente qui réalisent un chiffre d’affaires total de 239 milliards d’euros, soit 70 % du chiffre d’affaires du commerce de détail des secteurs couverts. De très grands réseaux, par le nombre de magasins ou le chiffre d’affaires, côtoient des réseaux de taille plus modeste. Ainsi, les 10 % les plus grands réalisent 82 % du chiffre d’affaires des réseaux tandis que les 10 % les plus petits ne totalisent que 3 millions d’euros de chiffre d’affaires (soit 0,001 %). Les plus grands regroupent une moyenne de 466 magasins, les plus petits 23. Les plus grands sont concentrés dans les grandes surfaces alimentaires, alors que les plus petits se retrouvent dans tous les secteurs.
Les 34 réseaux de grandes surfaces alimentaires regroupent chacun une moyenne de 345 magasins, pour un chiffre d’affaires de 4,5 milliards d’euros par réseau (tableau 1). Les magasins sont eux-mêmes de grande taille. À l’opposé, dans certaines activités, telles l’équipement de la personne (hors habillement et chaussures) ou l’équipement du foyer, les réseaux sont plus petits et les magasins aussi.


Trois grandes formes d’organisation
Trois formes d’organisation prédominent dans le commerce de détail : les réseaux intégrés, où la tête de réseau possède les points de vente en propre, les groupements d’indépendants et les réseaux de franchise (tableau 2).
Lorsque les points de vente appartiennent directement à l’entreprise tête de réseau ou à l’une de ses filiales, on parle de magasins succursalistes ou intégrés ; ces magasins sont juridiquement ou financièrement dépendants de la tête de réseau. Cette forme d’organisation regroupe 31 % des points de vente en réseau et totalise 52 % du chiffre d’affaires total des réseaux.
Près de 24 % des points de vente appartiennent à des entreprises indépendantes qui adhèrent à un groupement ; ces entreprises se regroupent le plus souvent sous forme de coopérative, autour d’une centrale d’achats, afin de bénéficier de conditions d’achats et de services. Elles totalisent 33 % du chiffre d’affaires des réseaux.
Enfin, 16 % des points de vente sont franchisés ; ils appartiennent à des entreprises indépendantes qui bénéficient notamment du savoir-faire et de l’enseigne du franchiseur. Ils représentent 9 % du chiffre d’affaires total.
Ces trois types d’organisation couvrent l’essentiel de l’activité des réseaux (94 % du chiffre d’affaires total). Le reste correspond à des formes contractuelles de faible poids en termes de chiffre d’affaires, mais plus important en nombre de magasins : quelque 30 % de magasins sont soit sous licence de marque, soit concessionnaires ou affiliés à une centrale d’achats.


Un tiers des réseaux a recours à plusieurs types d’organisation

Dans la majorité des réseaux étudiés, le type de relation entre la tête de réseau et ses membres est uniforme. Ces réseaux « purs » représentent 60 % du total tant en chiffre d’affaires qu’en nombre de magasins. Les autres réseaux sont « mixtes », c’est-à-dire que différentes formes d’organisation peuvent coexister au sein d’un même réseau. Le plus souvent ne coexistent que deux formes d’organisation ; une minorité fonctionne avec trois ou quatre formes contractuelles.
Presque tous les réseaux « mixtes » comportent des magasins intégrés. Ces réseaux mixtes sont souvent, en termes de chiffre d’affaires, des réseaux intégrés-franchisés. Ils proposent aux membres du réseau une formule éprouvée dans leurs magasins détenus en propre, qualifiés alors de magasins pilotes. Les réseaux mixtes de franchiseurs comportent souvent une majorité de magasins franchisés et recourent parfois aux contrats de licence de marque ou de concession.

Un type de réseau dominant pour certaines activités

Certains secteurs commerciaux sont orientés sur un type de réseau préférentiel (graphique) : ainsi les réseaux intégrés dominent en termes de chiffre d’affaires dans l’aménagement de l’habitat, l’équipement du foyer et l’équipement de la personne hors habillement et chaussure (maroquinerie, parfumerie...) ; les réseaux majoritairement intégrés dans les autres commerces non alimentaires. Le groupement est dominant dans les grandes surfaces alimentaires, les magasins de culture, loisirs et sports, tandis que les réseaux mixtes fortement franchisés sont les premiers en chiffre d’affaires dans les autres commerces alimentaires. Enfin, le commerce et la réparation automobile fonctionnent avec des réseaux de licence de marque. En revanche, les réseaux mixtes fortement franchisés sont présents dans tous les secteurs.
Cette différence d’implantation explique largement les disparités en termes de chiffre d’affaires moyen. Par exemple, 78 % du chiffre d’affaires des groupements et 74 % du chiffre d’affaires des réseaux mixtes faiblement franchisés proviennent de réseaux de grandes surfaces alimentaires. De même, les réseaux en concession sont concentrés sur deux secteurs : culture-loisirs-sports (41 % de leur chiffre d’affaires) et équipement du foyer (33 % de leur chiffre d’affaires). Les réseaux de licence de marque réalisent les deux tiers de leur chiffre d’affaires dans le commerce et réparation automobile et l’équipement du foyer.


Les groupements, réseaux les plus étendus
Les grandes différences de taille entre les types de réseaux proviennent de la répartition différenciée des organisations de réseaux dans les différents secteurs (tableau 3). Les réseaux organisés en groupement sont les plus étendus, avec 297 points de vente en moyenne, devant les réseaux de licence de marque (202 points de vente en moyenne). Les réseaux mixtes franchisés regroupent de 139 points de vente par réseau en moyenne pour les faiblement franchiseurs à 146 pour les fortement franchiseurs. Les réseaux « purs » intégrés sont les moins étendus, avec une moyenne de 87 points de vente.


Une forte emprise des groupes
La plupart des têtes de réseaux font partie d’un groupe. Il s’agit soit d’une logique production/distribution, dans laquelle un groupe industriel ou de service non commercial met en place un réseau de distribution, soit d’une logique de cohérence de l’enseigne, où un groupe commercial possède plusieurs enseignes, chaque enseigne étant positionnée sur un secteur, une gamme ou une taille de magasin spécifique. Chacune des enseignes peut alors profiter de certaines prestations centralisées au niveau du groupe, comme par exemple recourir à la centrale d’achats du groupe.
Sur les 455 têtes de réseau enquêtées, 372 appartiennent à un groupe ; parmi celles-ci, 87 sont têtes de groupe et 240 font partie d’un contour de groupe, c’est-à-dire sont détenues directement ou indirectement par une tête de groupe (tableau 4). Ainsi, 94 % du chiffre d’affaires total des réseaux sont réalisés par des structures dont la tête appartient à des groupes de sociétés. Pour la plupart des réseaux restants, la tête fait partie d’une mouvance élargie de groupe, c’est-à-dire est liée à des groupes de sociétés mais sans contrôle majoritaire.
Les 455 réseaux recensés ne sont en fait que 330 « groupes de réseaux » (tableau 5). En effet, des têtes de réseaux d’enseignes différentes peuvent appartenir au même groupe. Cette nouvelle approche de calcul donne un écart particulièrement fort pour les grandes surfaces alimentaires et l’aménagement de l’habitat. Ainsi, pour les grandes surfaces alimentaires, le nombre d’acteurs passe de 34 réseaux à 14 groupes de réseaux, et le chiffre d’affaires de 4,5 milliards par réseau à plus de 10 milliards par groupe de réseaux. Cette prise en compte des relations financières qui lient les réseaux les uns aux autres met ainsi en évidence une disparité de taille encore plus grande entre les réseaux.

Julien Fraichard, division Commerce, Insee, Corine Troïa, Insee Midi-Pyrénées

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