lundi 1 septembre 2008

L'animation en point de vente sort du rayon

Sortir du rayon pour conquérir de nouveaux clients, telle est la stratégie à la mode. Car malgré la professionnalisation de l'activité et l'intégration d'innovations dans les points de vente, les journées d'animation restent classiques.


Parfois «considérée comme un mal nécessaire par les annonceurs», selon l'expression de Pierre-Yves Raymond, p-dg de l'agence Marque and Co, l'animation commerciale obtient de bons résultats. D'après une étude réalisée par le cabinet MarketingScan en 2005 et citée par Richard Pellet, p-dg de Stella, «les ventes seraient multipliées par neuf lors d'une semaine de tête de gondole animée pendant deux jours (vendredi et samedi) par rapport aux ventes moyennes hebdomadaires du magasin». Pour autant, Delphine Foucaud, codirectrice générale de l'agence Circular, observe que «le marché n'évolue pas vraiment en valeur mais plutôt en qualité». Les industriels, dit-elle, «portent désormais plus d'attention aux investissements et donc au ROI, et à la qualité des prestations, dont celui-ci dépend».

Ainsi, la recherche du ROI, de l'efficacité commerciale dans le point de vente d'un côté, et l'exigence des consommateurs en matière de conseil de l'autre ont contribué à la professionnalisation des acteurs du marché. La première évolution remarquable est la priorité donnée par les agences à la formation des animatrices. «Elles sont l'élément fondamental du dispositif, martèle Valérie de la Vigerie, directrice générale de l'agence Allée Centrale (filiale du groupe HighCo), c'est pourquoi la profession doit mieux les former, mieux les coacher et mieux les stimuler.» Chez Allée Centrale, on investit donc en formation sur les méthodes de vente pour permettre aux animatrices de disposer d'un vrai bagage commercial. Des sessions sont organisées une fois par semestre, au sein de l'Académie «maison», créée afin d'aider les «meilleurs» salariés à développer encore leurs compétences. Ces sessions s'ajoutent aux formations «produits» exigées par les marques.

Même discours chez Circular, où la formation est considérée comme fondamentale. Ici, les animatrices sont spécialisées par secteur d'activité: food, beauté, high-tech. Elles sont recrutées en fonction de leur affinité au produit, de leur expérience et de leur profil. Puis elles enrichissent leurs connaissances au gré des sessions. «Le consommateur attend que l'animatrice le conseille», note Delphine Foucaud. C'est elle qui vend le produit. Aujourd'hui, l'e-learning facilite l'organisation de sessions à distance.

Deuxième axe de progression, la motivation. Le travail des animatrices est soutenu par la mise en oeuvre d'un certain nombre d'outils destinés à les motiver. Par exemple, grâce à une plateforme de gestion en ligne, Allée Centrale permet aux animatrices d'être plus autonomes. Elles ont accès aux données concernant l'animation à préparer, peuvent consulter des informations complémentaires via une bibliothèque ou encore gérer leur emploi du temps. En outre, l'agence a mis en place un plan de stimulation. En fonction de leurs compétences, les hôtesses accumulent des points qu'elles dépensent en les échangeant contre des cadeaux proposés dans une boutique en ligne. Chez Promodip, Stéphanie Gresset, directrice de production, cite l'exemple de «l'incentive mis en place pour les animateurs des journées commerciales de Canal Plus: les objectifs sont fixés par jour et par magasin. Mais pour que ce genre de stimulation fonctionne, l'annonceur doit parfaitement connaître le maillage des points de vente et leur potentiel.» Cette politique de ressources humaines ambitionne de revaloriser la mission des salariés sur le terrain tout en leur offrant de nouveaux moyens pour exercer une profession, jusqu'à ici peu considérée.

DES MISES EN SCÈNE PLUS MARQUANTES

Si les professionnels évoquent plus volontiers une évolution dans les pratiques de l'animation commerciale qu'une révolution, tous s'accordent à reconnaître la montée en qualité des mises en scène. Certes, le gros des actions demeure classique. Le positionnement des marques dans leur façon de communiquer reste inchangé. Dans la plupart des cas, une animatrice est présente en rayonnage pour distribuer des bons de réduction. Car l'animation coûte cher, entre 140 et 180 euros par jour pour la seule rémunération de l'hôtesse (la moyenne serait à 160). Budget auquel il faut ajouter l'investissement en PLV, en bons de réduction, en scénographie. Comptez environ 220 à 250 euros HT par jour pour une opération basique. Un budget qui grimpe de façon exponentielle lorsque l'animation rime avec événementiel.

L'arrivée de nouveaux annonceurs a dynamisé le secteur. Ainsi, explique Pierre-Yves Raymond, «les fournisseurs de téléphonie ou d'Internet ont exprimé de nouveaux besoins auxquels il a fallu répondre, notamment en faisant appel à du personnel masculin, formé aux technologies». Car le marché de l'animation commerciale est porté par quelques secteurs d'activité: l'alimentaire, les produits d'entretien, la cosmétique et le high-tech. Le premier secteur se cantonne à des animations classiques, peu innovantes. En la matière, le must aujourd'hui est de renforcer la présence de la marque dans l'hypermarché par l'organisation de dégustations. Le secteur de la beauté reste le plus audacieux. La théâtralisation des opérations s'y développe. Les journées d'animation sont plus visibles. Ainsi, témoigne Elisabeth Exertier, directrice associée du Site Marketing, «dans le secteur de la beauté, les mises en scène sont plus appropriées aux hypers, nous observons la multiplication des podiums, des bars de maquillage, nous voyons émerger des espaces plus colorés qui s'imposent dans les allées centrales ou pénétrantes et qui gagnent donc en impact». Ces animations événementielles sont servies par la mise en place de décors très travaillés avec des stands lumineux, des sols recouverts de moquette et la mise à disposition d'une PLV de qualité. D'ailleurs, remarque la directrice du Site Marketing, «les accessoires prennent de plus en plus d'importance, les animatrices sont équipées de ceintures d'échantillons ou de pinceaux, les cadeaux remis aux consommateurs sont choisis avec soin pour rester le plus longtemps possible présents dans les foyers». Par exemple, telle marque offre une pince à cheveux, telle autre un tee- shirt fabriqué en édition limitée. Les annonceurs ne mégotent pas. Un nouvel outil, le conseil via le diagnostic, fait fureur. Fructis de Garnier réalise des diagnostics cheveux grâce à un dispositif de vidéo-microscope grossissant, relié à un ordinateur. En quelques minutes, l'animatrice peut orienter le client vers le produit qui correspond le mieux à la texture de ses cheveux.

De plus, les agences ont tendance à mixer les outils et à déployer pour une même opération à la fois des totems, un stop rayon et un stand. «La multiplication des supports augmente la visibilité», note Valérie de la Vigerie. A la fin de la journée d'animation, il est de plus en plus fréquent de laisser dans les rayons des éléments de PLV ou un écran pour poursuivre la communication. Allée Centrale propose systématiquement à ses clients de déposer un scan-coupon dans le rayon. Avant de quitter son poste, l'animatrice installe un bloc de coupons de réduction équipé d'un scan qui enregistre le trafic.

Autre tendance, l'arrivée des nouvelles technologies a permis la diversification des types d'animation et ouvre des perspectives. Grâce à l'exploitation des bases de données clients, les annonceurs peuvent désormais inviter les consommateurs à venir participer à une animation. Plusieurs dates sont proposées dans les points de vente à proximité de leur domicile. Le flyer précise la nature de l'opération (lancement de produit, jeu-concours) et les gains (bons de réduction, cadeaux). Ainsi personnalisé, l'impact est plus fort. Les écrans envahissent les points de vente et permettent aux marques de garder le contact, même en l'absence de l'animatrice, en prolongeant l'opération pendant quelques jours ou, mieux, de façon pérenne.

LE MOBILE MARKETING ÉMERGE

Même s'il peine encore à s'imposer en France, le mobile marketing fait de plus en plus parler de lui. Pour Philippe Issaly, directeur général de l'agence Créature, «Il s'agit de la seule innovation majeure».

Ainsi Créature a développé avec Nike des opérations de reconnaissance d'images. Elles s'adressent exclusivement aux adolescents ou aux jeunes adultes et permettent aux consommateurs de photographier une affiche Nike et de l'envoyer. En échange, ils reçoivent des fonds d'écran, des musiques et participent à un concours. L'intérêt pour l'annonceur est bien évidemment de collecter des numéros de téléphones porta bles avec l'accord explicite du client. «Le téléphone mobile est un extraordinaire moyen de communication pour la marque et un outil de fidélisation efficace», remarque Philippe Issaly Le principal défaut du marketing mobile est de ne pas avoir encore percé la cible des ménagères. Il souffre également de faiblesses technologiques.

Parfois, il arrive qu'il y ait des ratés, «la technologie est au point au Japon, mais pas assez fiable en France, certaines marques en ont fait les frais», résume Richard Pellet. Dans tous les cas, remarque Georges Olivereau, directeur de création de l'agence Dragon Rouge, «l'animation choisit ses armes en fonction du concept de l'enseigne ou de la marque». Pas question pour ce spécialiste de la distribution spécialisée de faire appel aux nouvelles technologies pour des points de vente estampillés «terroir» ou des marques «tradition». Mais si le secteur d'activité s'y prête, il ne faut pas hésiter à déployer des écrans LCD pour diffuser le message de la marque.

DE L'IN-STORE À L'OUT-STORE

Enfin, les professionnels mettent aujourd'hui l'accent sur les actions menées en dehors des points de vente. Premières visées, les galeries marchandes. «Depuis trois ans, nous recrutons les prospects en dehors du magasin, et les galeries représentent un excellent terrain pour déployer des théâtralisations importantes», confie Richard Pellet. Sortir du rayon pour conquérir de nouveaux clients, telle est la stratégie à la mode. Stella a ainsi organisé pour Nana une tournée dans une trentaine de galeries marchandes. Le produit, intime, est difficile à traiter. «Nous avons contourné cette difficulté en jouant sur la signature de la marque, sur le sens de la féminité, en invitant les consommatrices à participer à un jeu sur le sens de l'orientation leur permettant notamment de gagner des GPS», explique-t-il. Et, ce n'est que lorsque la cliente valide sa participation au jeu que l'hôtesse procède à la démonstration produit. Stella a également fait sortir Ricoré de ses rayons.«Lorsque la marque organise une animation avec distribution de bons de réduction en rayon, elle obtient un taux de transformation de 100% parce qu'elle s'adresse à ses clients, consommateurs de Ricoré», souligne Richard Pellet. Mais pour recruter de nouveaux clients, elle doit gagner en visibilité. Avec un stand de dégustation installé dans la galerie marchande, elle enregistre un taux de recrutement de l'ordre de 27 % par rapport à l'ensemble du trafic impacté par l'animation. Les agences utilisent aussi les escalators comme supports de communication pour annoncer l'animation et y faire venir les consommateurs. Des panneaux d'affichage sont installés tout au long du parcours et des stickers collés sur les marches. Par définition, l'animation commerciale est ponctuelle. Or, de plus en plus d'enseignes et de marques penchent vers des animations conçues pour durer. C'est le cas, par exemple, lorsque Coca- Cola investit dans l'aménagement complet des linéaires sodas à ses couleurs, car il s'approprie le territoire des soft drinks. Et également lorsque Palais des Thés reçoit chaque client en lui offrant un verre de thé glacé l'été, une tasse de thé chaud l'hiver. «L'enseigne communique autour de son concept, la convivialité, l'hospitalité héritée des traditions asiatiques», commente Georges Olivereau. La finesse de l'animation marque les esprits. Sa régularité aussi.


Source : Marketing Magazine N°124 - 01/09/2008 - Véronique MEOT

Comment animer son réseau de distribution

Vous commercialisez vos produits via un réseau de distribution externe. Pour une relation gagnant-gagnant, mieux vaut adopter une stratégie de réseau réfléchie et efficace. Nos conseils pour accompagner vos revendeurs vers la performance.

ETAPE 1
A CHAQUE FAMILLE DE REVENDEURS SON APPROCHE COMMERCIALE

Traiter de la même manière l'ensemble de ses revendeurs est une erreur managériale et commerciale. Une approche différenciée s'impose.

«La segmentation est indispensable. Des entreprises s'éteignent faute de différenciation entre leurs catégories de clients.» Pour Patrick Descharmes, directeur associé du cabinet Uniteam, spécialisé dans l'animation des réseaux commerciaux, le succès d'une stratégie de vente, en indirect, passe par la constitution de typologies de revendeurs et par l'élaboration d'approches commerciales adaptées. Jérôme Blanchon, président du cabinet Overdrive, enfonce le clou: «Le traitement égalitaire fait régner la loi du plus fort. Ni les petits clients ni les gros n'y trouvent leur compte.»

Or, tout l'enjeu d'une démarche de segmentation est d'adapter sa communication et ses offres commerciales aux différents types de distributeurs, afin de répondre au mieux à leurs attentes sans disperser ses investissements. Le but étant que chacun soit traité selon son «rang». En procédant ainsi, vous accordez 80% de votre temps et de vos investissements aux partenaires grâce auxquels vous réalisez 80% de vos ventes.

«Bien souvent, observe Jérôme Blanchon, d'Overdrive, c'est l'habitude ou les a priori qui poussent les commerciaux à visiter un client plutôt que tel autre, ce qui les conduit à passer à côté d'opportunités.»

Les critères de segmentation. Qui dit segmentation, dit critères objectifs d'études et démarches différenciées. Le chiffre d'affaires ou - plus intéressante encore - la marge restent les critères les plus évidents. Mais d'autres paramètres peuvent être considérés, en fonction de l'activité de votre entreprise, comme le nombre de commerciaux employés par le revendeur, le chiffre d'affaires par commercial, l'image de marque, l'effet prescripteur, etc. A cela s'ajoute le potentiel de développement: mieux vaut se concentrer sur les revendeurs qui ne réalisent qu'une faible part de leur chiffre d'affaires avec votre ou vos marques. L'envie doit également être prise en compte. «Des correcteurs subjectifs interviennent, note Jérôme Blanchon, d'Overdrive. L'attachement de vos revendeurs à votre marque, leur dynamisme ou leur culture (adaptabilité, habitudes ancrées) comptent également.» A chacune de vos sous-catégories de distributeurs, vous associerez un discours et une tactique commerciale spécifiques. L'objectif étant de fidéliser les «meilleurs» et de dynamiser les «moyens», en leur accordant l'essentiel de votre énergie, quitte à délaisser les moins significatifs.


Quelles méthodes adopter?

Une fois vos distributeurs répartis en catégories, vous devez opérer des choix. C'est le but de la manoeuvre. Accordez aux plus gros d'entre eux un traitement VIP (récompenses, outils d'aide à la vente, hot line, SMS de suivi). Pour les moyens, des encouragements conviennent très bien. Ils peuvent prendre la forme de kits marketing, de quiz ou d'opérations promotionnelles. Enfin, il faut réserver aux petits des outils dont le coût est faible, comme les courriers de suivi. Sans oublier que «l'ensemble de ces partenaires ont un point commun: ils fonctionnent à la reconnaissance», comme le rappelle Jérôme Blanchon. Si vous avez organisé un événement, du type remise de diplômes, auquel vos gros et moyens partenaires ont été conviés, vous devez adapter la communication qui suivra. Les lauréats apprécieront d'avoir accès à un site web dédié à la soirée. Les perdants, quant à eux, seront touchés par un petit geste comme un «simple» courrier de remerciement.

ETAPE 2
FOURNISSEZ LES OUTILS ADÉQUATS D'AIDE À LA VENTE

Investir dans des outils efficaces et répondant aux besoins de votre réseau de distribution doit faire partie intégrante de votre stratégie d'animation commerciale.

Il ne faut pas se leurrer. Les revendeurs font très bien la différence entre les fournisseurs qui les accompagnent tout au long du processus de vente et... les autres. «Les revendeurs auront tendance à favoriser ceux qui leur facilitent le travail avec des outils adaptés à leurs besoins», affirme Claude Eppling, directeur de clientèle chez Mercuri International, un cabinet de développement de l'efficacité commerciale et managériale. En clair, vos produits seront rejetés s'ils sont trop compliqués à vendre. Autant dire qu'il est primordial de chouchouter les commerciaux de vos distributeurs si vous voulez conserver, a fortiori augmenter, vos parts de marchés dans les points de vente. La société Tickner l'a bien compris. Cette entreprise normande de 90 salariés fabrique des abris de jardin, des garages-charpente et des maisons individuelles en bois. 80% de sa production est commercialisée par un réseau de 70 agents commerciaux, présent dans toute la France. «Nous essayons de leur apporter tous les outils dont ils peuvent avoir besoin», commente Hugues Chevallier, directeur commercial. Justement, comment savoir de quoi vos partenaires ont besoin? «Pourquoi ne pas simplement le leur demander?», suggère Claude Eppling. Des enquêtes quantitatives ou qualitatives permettent de comprendre dans le détail les attentes des différents interlocuteurs clés chez le distributeur (gérants, commerciaux, etc.). «Pensez à leur faire hiérarchiser leurs besoins afin qu'Us distinguent les services vraiment utiles des prestations d'agrément», recommande l'expert. Vos moyens, financiers ou humains, ne vous permettront peut-être pas de répondre à toutes leurs exigen ces. Il vous faudra certainement faire des choix, notamment en fonction de la segmentation que vous avez instaurée. Réservez à vos meilleurs clients les outils les plus chers ou les plus difficiles à mettre en place. A la demande des agents commerciaux, Tickner a mis en place un système de devis sur son site internet. «Pour rassurer l'acheteur, il paraissait important aux commerciaux de pouvoir imprimer un devis immédiatement et devant le client», explique Hugues Chevallier. Le directeur commercial a également fait concevoir de la PLV (drapeaux et panneaux) portant le logo de la marque, qui manquait sur les anciens modèles, aux dires des commerciaux.


La PLV ne suffit pas.

La publicité sur le lieu de vente (maquettes de présentations, affiches, posters...) et l'information sur le lieu de vente, (catalogues à consulter, documentation technique, guides de poche...) sont des outils incontournables mais insuffisants. Certes, ils simplifient le processus d'information du client final et, par là même, le travail d'argumentaire du vendeur. Mais encore faut-il que ledit vendeur puisse argumenter et emporter l'adhésion de sa clientèle. Or, pour cela, il doit connaître votre produit sur le bout des doigts. «Dans un magasin multimarque, les vendeurs ont besoin que, pour chaque marque, des argumentaires écrits soient à leur disposition quand ils le souhaitent afin de se mettre à jour», indique Claude Eppling, de Mercuri International. Mais l'outil pédagogique le plus efficace reste la formation «en salle». Pour Patrick Cauvin, président de Com'in, cabinet spécialisé dans la formation, celle-ci doit intervenir dès le processus d'intégration des distributeurs. «Connaître les offres et les produits est la condition sine qua non d'une intégration réussie», estime l'expert, qui considère que les programmes «nouveaux commerciaux», où l'on réunit les «petits nouveaux» pour les former sur les produits et les services, sont une priorité. Il existe deux types de formation: celles dédiées aux produits et celles orientées vers les techniques de vente. Tickner demande, par exemple, à chaque nouvel agent commercial de passer deux jours dans son usine, afin de maîtriser les tenants et les aboutissants de la production. Il est formé par les intervenants auxquels il aura affaire par la suite. «Enplus, tous nos partenaires sont rassemblés une fois par an pour être formés aux nouveautés et je m'occupe des piqûres de rappel lors de mes passages, une à deux fois par an», indique Hugues Chevallier, le directeur commercial.


Transmettre les résultats de votre veille.

Enfin, vos partenaires peuvent apprécier que vous les épauliez dans le travail de veille. Votre secteur d'activité va être impacté par une nouvelle loi qui «change la donne»? Publiez une note de synthèse évoquant, de façon claire et simplifiée, le futur contexte juridique et le calendrier des décrets d'application. C'est un service que vos revendeurs apprécieront à coup sûr, et qui vous démarquera de vos concurrents. Péguet et Compagnie, petit fabricant de maillons rapides métalliques, ne manque jamais une occasion d'informer ses grossistes de l'évolution des normes dans son secteur. «Dès qu'un changement intervient, nous envoyons une note d'information. Nos partenaires, qui ne peuvent être à raffût de toutes les réglementations dans tous les domaines qu'ils couvrent, apprécient notre soutien», indique Fabien Encelle, responsable clientèle France.

Dernière recommandation. Evitez la créativité tous azimuts et les outils sophistiqués. La recherche des outils parfaits ne doit pas vous détourner des fondamentaux du commerce: qualité du produit et délais de livraison, notamment.

ETAPE 3
FIDÉLISEZ VOS REVENDEURS

Le développement d'une relation féconde et durable suppose de mettre en place une stratégie de fidélisation de votre réseau de distribution. et ce ne sont pas les moyens qui manquent.

Vos produits sont bons. Aussi, pensez-vous que cela suffit pour fidéliser vos partenaires. «Grossière erreur, corrige Roland Deponge, directeur général de Coup de Poing, cabinet spécialisé dans l'animation des réseaux de distribution. Pour conserver vos clients et vous démarquer de vos concurrents, qui proposent peut-être la même qualité d'offre que vous, vous ne pouvez faire l'économie d'une véritable approche de fidélisation.» Claude Eppling, directeur de clientèle chez Mercuri International, cabinet spécialisé dans le développement de l'efficacité commerciale et managériale, conseille, «avant toute chose, de choisir le segment sur lequel vous allez travailler: les gros revendeurs et/ou ceux qui ont du potentiel». Ensuite, vous devez garder en tête que votre réseau attend de ce plan de fidélisation des bénéfices tangibles. Chaque outil ou méthode doit répondre à une attente, qu'elle soit utilitaire (économie d'argent, accélération et simplification des modalités), hédoniste (récompense) ou affective (déjeuner client ou cadeau de fin d'année). Qui va «vendre» ce plan de fidélisation à vos revendeurs? Vos commerciaux. Alors, la première chose à faire, avant d'informer vos partenaires, est de convaincre votre équipe commerciale de son intérêt. Car peu importe la qualité du programme, s'il n'est pas correctement argumenté, il ne portera pas ses fruits.


Une stratégie différenciée.

Vous pouvez ensuite mettre en place votre programme de fidélisation. Sachez qu'il existe différents outils et méthodes de fidélisation, très simples, qui ne sont pas forcément très coûteux. Les courriers de suivi, par exemple, permettent d'apporter des informations personnalisées à vos revendeurs. Les kits marketing (argumentaire écrit, PLV, ILV) vous démarquent de vos concurrents tout en facilitant le travail des revendeurs. Ainsi, tout le monde est gagnant.

«Vous pouvez aussi investir davantage, en mettant en place des promotions commerciales et/ou une remise de fin d'année», suggère Roland Deponge, de Coup de Poing. Dans la même optique, pourquoi ne pas créer une assistance technique? «Cet outil est accessible aux PME», assure l'expert, qui suggère d'ailleurs de se montrer futé. Faites ouvrir une ligne téléphonique, puis communiquez ce nouveau numéro à votre réseau de distribution, en spécifiant qu'il s'agit d'une hot line. La ligne sera en fait affectée à une assistante chargée de transférer les appels vers le service technique ou vers le service commercial. «Ce petit plus conférera une touche professionnelle à votre entreprise, qui rassurera vos clients», affirme le directeur général de Coup de Poing.

Autre outil de fidélisation: le challenge commercial. Le principe est simple: à X quantités de produits vendus par vos revendeurs à leurs clients finaux correspondent des dotations (cadeaux, chèques- cadeaux, voyages...). Plus le montant est élevé, plus le présent est coûteux. «Ce système permet de remplacer les remises par des dotations, et vous pourrez ainsi préserver vos prix de vente», explique Claude Eppling, de Mercuri International. A la différence du concours, qui ne récompense qu'une poignée de lauréats, le challenge permet à tous les participants de remporter un cadeau, fût-il modeste. Vous pouvez même chercher un thème fédérateur dans l'actualité, comme une compétition de football, par exemple.


Un club de fidélité. Extranets, invitations VIP, remises sur volume, voyages... Les outils les plus onéreux doivent être réservés à vos meilleurs clients«Attention à ne pas présenter les avantages comme un dû, recommande Roland Deponge. Il est primordial que l'inscription au club soit corrélée à un chiffre d'affaires minimum.»Ce club doit donner à ses membres l'impression d'être «privilégiés». En envoyant une newsletter tous les deux ou trois mois à vos meilleurs partenaires, par exemple, vous leur apportez des informations utiles sur votre marché ou sur l'activité de votre entreprise: lancements de produits à venir, nominations, etc. Vous pouvez également monter des challenges ou des concours spécifiques avec des dotations particulièrement attrayantes. Dans ce cas, n'oubliez pas de communiquer sur l'opération, via votre site web par exemple: les heureux lauréats n'en seront que mieux valorisés. Quant aux autres, ils rêveront de faire un jour partie des «happy few»

ETAPE 4
GARDEZ UN LIEN AVEC LE CLIENT FINAL

Dans un contexte de concentration et de concurrence accrue, il devient inconcevable de laisser vos distributeurs seuls maîtres du jeu. Vous devez parvenir à toucher le client final, démarche indispensable pour baliser l'avenir de votre entreprise.

Leroy Merlin, Castorama, Point. P, Mr. Bricolage et autres distributeurs sont devenus de véritables marques, parfois plus connues que les produits de leurs rayons. Tout l'enjeu, pour leurs fournisseurs, est donc d'avoir un poids suffisant pour ne pas subir leur choix de commercialisation indirecte. Et cela passe par une bonne connaissance du client final, de ses besoins et de ses envies. En effet, impossible de s'adapter, de faire évoluer son offre et de réussir un lancement de produit sans détec ter les besoins et les intentions d'achat du client final.

Premier conseil: ne comptez pas seulement sur vos distributeurs pour vous constituer un fichier de clients finaux. Comme le souligne Patrick Descharmes, directeur associé chez Uniteam, agence spécialisée dans l'animation de réseaux, «un distributeur qui réalise 3% de son chiffre d'affaires avec un fournisseur sera peu enclin à lui ouvrir son fichier clients». Hervé Fuks, directeur conseil associé chez Everest, agence conseil en marketing relationnel, renchérit:«Même s'il s'agit d'un gros client qui vous prend en considération et qui a tout à gagner dans l'histoire, il reste un filtre.»Rien ne remplace le contact direct avec le client final. Alors comment procéder? Les outils pour acquérir ces informations ne manquent pas. Il suffit de les adapter à vos moyens.

Pour fidéliser les consommateurs à sa marque et non pas à l'enseigne de ses distributeurs, Péguet et Compagnie, fabricant savoyard de maillons rapides métalliques (mousquetons, etc.), a opté pour la publicité. Mais pas n'importe où et à n'importe quel prix. Pour quelques milliers d'euros, la PME de 55 salariés s'offre des annonces dans des magazines de niche comme Parapente Mag, Le Marin ou Bateau et Loisirs Nautiques. «Ces supports spécialisés nous permettent de toucher nos consommateurs finaux: les passionnés de parachutisme, de pratiques outdoor et de vol libre», explique Fabien Encelle, responsable clientèle France. «Une bonne notoriété auprès du client final constitue un atout dans votre relation avec la distribution, analyse de son côté Hervé Fuks, d'Everest. Si votre marque est connue et donc demandée par les consommateurs, même si votre entreprise ne représente qu'une part négligeable du chiffre d'affaires de vos revendeurs, ces derniers ne pourront pas vous écarter.» Mais pour y parvenir, une visibilité impactante et une présence récurrente auprès des cibles finales sont indispensables.


Miser sur le créatif. D'autres outils permettent d'influencer la décision des clients finaux et ainsi d'orienter efficacement la demande chez le distributeur.

«Les petites structures ont tout intérêt à miser sur la créativité, estime Patrick Descharmes, d'Uniteam. Le marketing viral, ou buzz (version électronique du bouche à oreille), est accessible aux dirigeants imaginatifs. L'idée est simple: vous concevez un message ou une vidéo humoristique, que vous adressez, par e-mail, à vos contacts, lesquels le transmettront aux leurs, et ainsi de suite. Vous pouvez aussi communiquer auprès des prescripteurs et autres «leaders d'opinion«: les écoles de parapente, par exemple, pour un fabricant de mousquetons.»

Autre possibilité pour nouer une relation de proximité avec le client final: vous constituer un panel d'utilisateurs, que vous interrogerez régulièrement afin de mieux cerner leurs suggestions et leurs besoins. Ce genre de panel fonctionne très bien par e-mail. Vous pouvez graver ou inscrire sur le packaging de vos produits, l'adresse de votre site internet. Au préalable, vous aurez prévu une page de captation d'adresses: en échange de quelques échantillons ou petits cadeaux, l'internaute fournira des informations précieuses sur lui-même. «Lesquelles vous permettront ensuite de développer un marketing de différenciation qui rendra votre marque incontournable», indique Hervé Fuks, d'Everest. Une façon ingénieuse, également, de se constituer un fichier de clients fidèles pour déployer des campagnes de marketing direct. «Mais attention, prévient le consultant, un tel fichier n'est utile que si vous vous donnez les moyens de l'utiliser.» Une précision importante, d'autant que la mise à jour et l'enrichissement d'un fichier demandent du temps et de l'argent.

Enfin, n'oubliez pas d'être attentif à la réaction de vos revendeurs: il est possible, même si vous ne faites pas de vente directe à proprement parler, qu'ils aient l'impression d'être court-circuités. Vos relations commerciales pourraient s'en trouver altérées.

CAS PRATIQUE
NORAIL MISE SUR L'ANIMATION PROMOTIONNELLE

Pour accompagner ses revendeurs, la PME ne lésine pas sur les moyens: PLV, challenges, formation. Sans oublier de garder un lien avec le client final.

Gédimat, Mr. Bricolage... Le conditionneur de vis, boulons et autres produits de quincaillerie, Norail, réalise 70% de son chiffre d'affaires avec les grandes enseignes de bricolage. Viennent ensuite les quincailleries indépendantes (20%) puis l'export (10%). Conscient de la nécessité d'animer son réseau, Charles Blangis, président de cette entreprise de 80 salariés, accompagne tous ses revendeurs quel que soit le chiffre d'affaires qu'ils génèrent. «Je ne vais pas ignorer un client sous prétexte qu'il ne représente qu'un faible pourcentage de mes ventes. Ce n'est pas ma philosophie», indique le dirigeant. Chaque client se voit donc offrir les mêmes promotions et reçoit autant d'e-mailing d'informations. Toutefois, pragmatique, le chef d'entreprise adapte ses services et ses offres promotionnel les à la taille de ses clients. Ainsi, quand Norail lance un challenge, elle imagine trois paliers pour l'obtention de cadeaux, pour que tous ses partenaires puissent lutter à armes égales. Dans le même esprit, les douze commerciaux de l'entreprise visitent une fois par mois les «gros» distributeurs, tous les deux mois les «moyens» et tous les quatre à cinq mois les «petits».


Des outils d'aide à la vente.

Pour soutenir les commerciaux de ces distributeurs, la PME conçoit en interne des PLV et des ILV, qu'elle fait fabriquer par un prestataire. «La théâtralisation des points de vente facilite le travail de leurs vendeurs», indique Charles Blangis, qui vient de faire livrer des frontons pour booster la vente d'un type de cheville. Ce support, constitué de photos et d'informations sur le produit, est un outil d'aide à la vente apprécié des commerciaux. Il reprend l'argumentaire et le guide d'utilisation papier mis à leur disposition. Et s'avère tout particulièrement utile lorsqu'il s'agit d'un produit technique.

Norail ne néglige pas non plus la formation. Et s'y investit même de plus en plus. Pourquoi? «D'abord, parce que les vendeurs admettent qu'ils en ont besoin et le réclament à nos commerciaux, explique le dirigeant. Ensuite, parce les vendeurs ont naturellement tendance à mettre l'accent sur les produits qu'ils connaissent le mieux, autrement dit ceux qui sont référencés depuis des années, au détriment des derniers-nés, bien souvent plus techniques.» Cette attitude pénalisant les ventes de nouveaux produits, il a fallu agir. En plus des formations orales informelles à l'occasion de leurs passages mensuels ou trimestriels, les commerciaux de la PME mettent les bouchées doubles au moment de lancements de produits. A la fin du mois, par exemple, pour la commercialisation d'une nouvelle vis, ils assureront une démonstration pour l'intégralité des vendeurs. «De quoi mettre toutes les chances de notre côté.»


Comment fidéliser le réseau.

Si la formation constitue l'un des outils de fidélisation de l'entreprise, ce n'est pas le seul. Tous les ans, Norail perd entre 50 et 100 revendeurs et en conquiert autant, soit un turnover de 3 à 4% environ. Même s'il considère que le milieu du bricolage est plutôt fidèle, le président de la PME a choisi de mettre l'accent sur les challenges, qu'il ouvre à tous les responsables de points de vente. En juin, afin d'inciter son réseau à référencer de nouvelles gammes, la PME a lancé un challenge sur trois familles de produits. X mètres linéaires de nouveaux produits vendus faisaient gagner un chèque-cadeau de x euros ou un voyage pour deux au Maroc. En parallèle, les magasins prospectés sont invités à participer à ce challenge dans le cadre d'une création de gamme. «Les dotations sont les mêmes. Notre plateforme les appelle pour les démarcher et les relancer. Avec un challenge, nous fai sons d'une pierre deux coups: de l'animation et du recrutement», commente le chef d'entreprise. De cette opération, il compte dégager 200 000 euros de chiffre d'affaires. Comme à chaque fois, 15% du CA attendu ont été investis dans les primes des commerciaux et les dotations. Un effort financier significatif, mais bénéfique aux yeux de Charles Blangis, qui organise quatre à cinq opérations de stimulation par an: «Elles boostent nos ventes et nous permettent de resserrer les liens avec nos distributeurs.» Cela prend différentes formes: contre x produits commandés, le distributeur reçoit des packs de bière, des ballons ou des maillots de football. «Ces cadeaux sont indispensables pour les inciter à jouer notre jeu, explique le dirigeant. Ils ont leurs habitudes et leurs fournisseurs attitrés pour tel ou tel article. Alors pour récupérer les mètres linéaires d'un concurrent, il faut miser sur ce qui motive et amuse les vendeurs.»


Ne pas négliger le client final.

Obtenir de l'espace sur les rayonnages de Mr. Bricolage est une chose, mais amener le consommateur à acheter en est une autre. Et Charles Blangis le sait bien. La connaissance du client final ne doit pas être négligée.

«Comme nous ne sommes jamais en contact direct avec nos clients finaux, nous savons peu de choses sur eux, et a fortiori sur leur vision de la marque», regrette le président de Norail. Pour pallier cette lacune, le chef d'entreprise organise, chaque année, un sondage en magasin sur un produit. Le consommateur indique s'il connaît ce produit, s'il s'en est déjà servi, etc. «C'est une manière de tester notre notoriété auprès du grand public, pas de court- circuiter nos partenaires, assure le dirigeant, qui voit d'un mauvais oeil les fournisseurs se lançant dans la vente directe, via l'e-commerce, par exemple. Il faut jouer le jeu du réseau de distribution à 100%. La politique du double jeu est mal perçue par les revendeurs.» Charles Blangis se fie donc à son réseau, qui le lui rend en lui délivrant de précieuses informations: tous les deux mois par exemple, cinq magasins pilotes lui font part de leurs remontées clients.«Cela contribue à instaurer une relation de partenariat. C'est cela, le gagnant-gagnant.»


Source : Chef d'entreprise Magazine N°31 - 01/09/2008 - Gaelle Jouanne